L’assuré: consentement, suicide et bénéficiaire d’un contrat

L’assuré: consentement, suicide et bénéficiaire d’un contrat

Section 2 : l’assuré

L’assuré est la personne sur laquelle repose le risque de décès ou de survie.

En matière d’assurance décès « contrat vie entière » ou « temporaire décès », c’est le décès de l’assuré qui oblige la compagnie d’assurance au paiement du capital.

Inversement en matière d’assurance à capital différé, c’est la survie de l’assuré au terme du contrat qui oblige la compagnie au paiement du capital.

A la différence du souscripteur et du bénéficiaire l’assuré est toujours une personne physique.

§ 1 / Le consentement de l’assuré

Nous l’avons vu le souscripteur et l’assuré bien que souvent la même personne peuvent être des personnes distinctes.

L’article L 132-1 du Code des assurances pose le principe général selon lequel « la vie d’une personne peut être assurée par elle-même ou par un tiers »

Il est complété par la loi du 7 janvier 1981 qui énonce : « Plusieurs personnes peuvent contracter une assurance réciproque sur la tête de chacune d’elles par un seul et même acte » (souscription conjointe ; voir infra).

Cependant le choix de l’assuré n’est pas totalement libre, les articles L 132-2 et L 132-3 du Code des assurances édictent certaines restrictions relatives aux assurances en cas de décès sur la tête d’autrui.

A/ Le consentement de l’assuré à la conclusion du contrat

Seul le souscripteur est partie au contrat avec l’assureur, cependant l’article L 132-2 du Code des assurances fait intervenir l’assuré, qui n’est qu’un tiers à la conclusion du contrat.

Ce dernier doit donner son consentement par écrit avec indication du capital ou de la rente initialement garantis à peine de nullité du contrat.

Il doit également donner son consentement par écrit pour toute cession, constitution de gage ou encore transfert du bénéfice du contrat souscrit sur sa tête.

La sanction est une nullité absolue, qui peut être invoquée par tout intéressé et n’est pas susceptible de confirmation.

B/ L’interdiction des assurances sur la tête de certains incapables

L’article L 132-3 du Code des assurances interdit de contracter un contrat d’assurance décès sur la tête d’un mineur âgé de moins de 12 ans, d’un majeur sous tutelle ou d’une personne placée dans un établissement psychiatrique d’hospitalisation.

La sanction est la nullité du contrat qui peut être invoquée par l’assureur, le souscripteur ou le représentant de l’incapable.

Les primes payées doivent intégralement être restituées et des sanctions pénales sont applicables à l’assureur et au souscripteur.

L’article L 140-5 de Code des assurances institue toutefois une dérogation pour l’assurance de groupe, le représentant légal d’un majeur en tutelle peut adhérer au nom de ce dernier à un contrat d’assurance de groupe en cas de décès, conclu pour l’exécution d’une convention de travail ou d’un accord d’entreprise.

Précisons également que s’il est possible de souscrire un contrat d’assurance décès sur la tête d’un mineur de plus de 12 ans, le consentement de l’intéressé et de son représentant légal sont nécessaires.

Le mineur émancipé et la femme mariée ont une pleine capacité de droit et n’ont donc besoin d’aucune autorisation.

https://wikimemoires.net/contact/le-suicide-egoiste-altruiste-anomique-et-subsidiaire/

Le suicide de l'assuré§ 2 / Le suicide de l’assuré (assurance vie et suicide)

Dans les contrats individuels d’assurance en cas de décès, la couverture du suicide de l’assuré pendant la première année du contrat est interdite (Art. L 132-7 C. ass.).

La preuve du caractère volontaire du suicide incombe à l’assureur (Civ.1 22/10/1996 Bull Civ. n°359).

Les assureurs sont en revanche obligés de couvrir le suicide dès la deuxième année du contrat.

Les clauses contractuelles prévoyant une durée d’exclusion supérieure à un an ou excluant le suicide sont interdites.

https://wikimemoires.net/2013/06/le-suicide-dans-lhistoire-du-moyen-age-a-lancien-regime/

Section 3: le bénéficiaire d’un contrat d’assurance

Le bénéficiaire est la personne qui est appelé à recueillir le bénéfice du contrat d’assurance vie en cas de décès.

Il peut s’agir d’une personne physique ou d’une personne morale, hypothèse notamment des contrats « homme clef » dans le cadre de l’entreprise.

Ou encore de l’assurance décès contractée sur la tête du dirigeant s’étant porté caution d’un prêt consenti à la société, le bénéficiaire pouvant dans ces cas-là être la société.

§ 1 / L’identification du bénéficiaire

Le bénéficiaire a, sur le fondement de la stipulation pour autrui, un droit propre et direct à l’encontre de l’assureur sur le capital garanti.

Encore faut-il qu’il soit déterminé (A) ou tout au moins déterminable (B), à défaut l’assurance serait censée faite sans désignation de bénéficiaire.

Il est possible, et parfois conseillé de désigner plusieurs bénéficiaires (C).

A/ La désignation directe

Le bénéficiaire est désigné de manière nominative.

B/ La désignation indirecte

Si la détermination du bénéficiaire peut être directe, il n’est nullement exigé que le bénéficiaire soit nominativement désigné. Il suffit qu’il soit déterminable.

Ainsi aux termes de l’article L 132-8 du code des assurances :

« Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

  • les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;
  • les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire pré décédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité ».

Certaines de ces désignations indirectes appellent des précisions utiles à la pratique notariale.

Contrat au bénéfice « des enfants nés ou à naître »

La portée de cette désignation s’apprécie, non au moment de la souscription du contrat, mais au moment de la survenance du risque, c’est-à-dire lors du décès de l’assuré (Civ.1 10/12/1985, Bull. Civ. I n°339).

Les enfants conçus mais non encore nés à la date du décès de l’assuré constituent donc des bénéficiaires déterminés.

Contrat au bénéfice « des héritiers »

Pour Messieurs Picard et Besson il faut entendre par héritiers « tous les successibles, non seulement les héritiers légitimes ou naturels, mais encore les successeurs irréguliers, dès lors que la mort de l’assuré les met en rang utile pour succéder ».

Le conjoint survivant peut donc se prévaloir de la qualité d’héritier, dans la mesure où la loi lui confère une vocation successorale depuis le 3 décembre 2001 (Art. 757 C Civ.).

La Cour de Cassation a également reconnu la qualité d’héritier au légataire universel (Civ. 1, 4/4/1978, Bull. Civ. n°138).

Dans cette affaire le défunt avait souscrit un contrat d’assurance vie en cas de décès, en ayant désigné comme bénéficiaires « ses héritiers ».

Il laissa à sa succession trois héritiers ab intestat non réservataires, dont l’un avait été institué légataire universel par testament olographe.

Toute la question était de savoir si le capital décès devait être attribué aux héritiers ab intestat ou seulement au légataire universel.

La Cour de Cassation a opté pour seconde hypothèse en affirmant que le terme « héritier » englobait tous les successeurs et non pas seulement les successeurs ab intestat.

La question s’est également posée de l’interprétation à retenir en présence d’une clause bénéficiaire faite au profit de « mes héritiers par parts égales » lorsqu’il existe un légataire universel et des héritiers réservataires.

Dans cette situation le capital sera partagé entre les héritiers réservataires et le légataire universel à parts égales.

Notons enfin qu’il n’est pas nécessaire d’accepter la succession pour revêtir la qualité d’héritier.

Le bénéficiaire peut renoncer à la succession du souscripteur/assuré tout en conservant ses droits sur le contrat d’assurance vie.

Contrat au bénéfice du « conjoint »

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité du capital assuré, et non à celle qui était le conjoint au moment de la souscription du contrat ou au moment de la désignation du bénéficiaire.

On notera une décision de la cour d’appel de Rennes du 6 novembre 2002 qui faisant prévaloir la volonté du souscripteur a accepté que le terme « mon conjoint » vise le concubin du souscripteur.

Le terme « conjoint » a été interprété en fonction de la situation maritale de la personne concernée qui au moment de la souscription du contrat vivait depuis fort longtemps avec son compagnon.

Cette décision démontre bien que les clauses bénéficiaires doivent être interprétées en fonction de l’intention des parties, ce qui est de la mission des juges du fond.

C / La pluralité de bénéficiaires

Il est souhaitable de prévoir un bénéficiaire ou des bénéficiaires de substitution pour le cas où le bénéficiaire désigné décèderait avant le dénouement du contrat ou n’accepterait pas le bénéfice du contrat.

En effet dans une telle situation le contrat d’assurance vie serait réalisé sans désignation de bénéficiaire avec toutes les conséquences civiles et fiscales que cela comporte (infra).

bénéficiaire d'un contrat d'assuranceLe souscripteur a une grande liberté de choix quant à la désignation du ou des bénéficiaires, nous nous intéresserons plus particulièrement à la clause bénéficiaire « en sous ordre ».

La clause type proposée par les compagnies d’assurance est la suivante : Bénéficiaires en cas de décès :

« Mon conjoint, à défaut mes enfants nés ou à naître, vivants ou représentés, à défaut mes héritiers ».

Au dénouement du contrat d’assurance vie le capital garanti sera versé au bénéficiaire de premier rang.

Si ce dernier renonce au bénéfice du contrat le capital sera alors versé aux bénéficiaires subsidiaires.

Du point de vue fiscal les droits éventuellement dus sur la valeur du capital acquis au décès de l’assuré ou dans le cadre de l’article 757 B du CGI (infra) seront liquidés en fonction du lien de parenté existant entre le second bénéficiaire et l’assuré.

Si le bénéficiaire de premier rang décède, il faut distinguer selon que le décès intervient avant ou après le dénouement du contrat.

– Si le décès intervient avant le dénouement du contrat, le capital est attribué aux bénéficiaires subsidiaires et ce même si le bénéficiaire avait accepté la clause rédigée à son profit (Art. L 132-9 C.ass.).

– Si le décès intervient après le dénouement du contrat, l’attribution du capital dépend de l’acceptation ou non de la clause bénéficiaire.

Si le bénéficiaire avait accepté la clause faite à son profit avant de décéder le capital est versé à ses héritiers, les bénéficiaires subsidiaires n’ayant dans cette hypothèse aucun droit.

En revanche si le bénéficiaire n’avait pas accepté la clause faite à son profit le capital est alors versé aux bénéficiaires subsidiaires (Civ.1, 10/6/1992 ; Bull Civ I n°174).

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